Relocalisation : nos territoires alpins peuvent-ils relever le défi ?

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La pandémie de Covid-19, et les pénuries qu’elle a entraîné en mars 2020 pendant les premières semaines de confinement (masques, tests, gel hydro-alcoolique, médicaments notamment), a mis en évidence un besoin important de relocaliser les productions jugées « essentielles » sur le territoire. L’objectif de cette relocalisation ? Ne plus dépendre de l’étranger, en particulier de l’Asie du Sud-Est. Une nécessité que les milieux patronaux eux-mêmes ont bien compris, afin de ne plus être pieds et poings liés avec les fournisseurs extérieurs à la France.

Relocaliser et réindustrialiser la France s’érigent désormais en nécessité absolue. La désindustrialisation a commencé dans les années 1980, à grand coup de délocalisations dans des pays tiers, où la production est “low-cost”. Un mouvement qui a entraîné une baisse de la part de l’industrie dans le PIB. En France, le PIB industriel représente seulement 13,5% de la richesse produite contre le double en Allemagne. L’ère des « entreprises sans usine » (la fameuse maxime de Serge Tchuruk ayant conduit un fleuron-Alcatel- à devenir un acteur de second plan) est-elle en train de laisser la place à une redynamisation industrielle des territoires français ?

Entre la hausse vertigineuse des prix de certaines matières premières (Exemple : acier ou bois) et la pénurie actuelle de certains composants, la relocalisation de certaines productions sur le sol français semble évidente. Le “Made in France”, à la fois encouragé par les pouvoirs publics dans le cadre du plan France Relance (initié en 2020 suite à la pandémie) et plébiscité par une large majorité de la population française, s’impose comme une priorité.

Qu’en est-il sur nos territoires alpins dans tout cela ? Sont-ils armés pour accueillir des relocalisations industrielles et qu’ont-ils à y gagner ?

Des territoires déjà très industriels

Sans atteindre le niveau de l’Allemagne, certains de nos départements ont déjà un tissu industriel fort : c’est le cas de l’Isère et de l’Ain, mais encore plus de la Haute-Savoie où l’industrie représente plus de 20 % du PIB.

Dans les années 2000, l’automatisation et la robotisation ont rendu les entreprises moins dépendantes des coûts de mains-d’œuvre, traditionnellement élevés surtout à l’approche de la frontière suisse (Haute-Savoie et Pays de Gex). Des investissements qui ont permis de booster la valeur ajoutée de leurs produits tout en maintenant une production locale.

Plasturgie dans l’Ain et le Jura, mécanique industrielle en Haute-Savoie, ou encore électronique de précision en Isère ont pu ainsi préserver leur production locale.

L’existence d’une main-d’œuvre formée

Lorsqu’une entreprise fait le choix d’un territoire, elle se penche à la fois sur la taille du bassin d‘emploi et sur son employabilité, c’est à dire la qualification de la main d’œuvre pour une prise de poste rapide.

Nos territoires ont historiquement toujours su développer des filières de formation d’excellence. Plus récemment, le développement de clusters (alimentaire, outdoor, mécatronique…) ont permis de coupler et de mettre en synergie les parcours de formation et les entreprises. Par ailleurs, la présence de pôles universitaires de premier plan (Grenoble, Chambéry) vient conforter l’accès des entreprises à une main d’œuvre de qualité.

Un cadre de vie d’excellente qualité

Autre avantage non négligeable pour séduire des candidats à la relocalisation : le cadre de vie de nos départements. Avec des villes à taille humaine, un magnifique environnement naturel (fait de lacs et de montagnes) et toutes les activités de plein air qu’il permet, il est facile d’attirer de futurs travailleurs industriels. Certains départements comme la Savoie et la Haute Savoie, connaissent depuis des années de forts taux de progression démographique.

Pourtant, tout n’est pas si simple. Il existe de nombreux freins à la relocalisation d’activités de production.

Des coûts de vie élevés et des zones saturées

En particulier le long de la zone frontalière Franco-Suisse, la vie est chère. Une contrainte qui rend impossible l’implantation de certaines activités à faible valeur ajoutée et à niveaux de salaires bas. En effet, outre l’impossibilité d’absorber les coûts de la main d’œuvre, les coûts des loyers ou des terrains sont prohibitifs pour ces activités. La tentation d’aller travailler en Suisse est de plus en plus forte, vu le niveau de salaire offert de l’autre côté de la frontière.

Partout, de Valence à Annecy, en passant par Grenoble et Chambéry, les disponibilités foncières se raréfient malgré des besoins grandissants. Ainsi, le prix de vente d’un bien industriel récent a augmenté de 300 euros m2/an ces 5 dernières années.

De plus, les nouvelles dispositions environnementales figurant dans la loi Climat et Résilience viennent complexifier les choses avec une ferme volonté de stopper l’artificialisation des sols. C’est d’ailleurs l’objectif du texte de loi ZAN (zéro artificialisation nette) fixé par le plan biodiversité de 2018 qui nécessite de dresser un état précis de l’artificialisation des sols que chaque nouvelle opération immobilière génèrera.

Quelles solutions pour faciliter la relocalisation

Les acteurs quotidiens de l’immobilier d’entreprise ont un rôle à jouer dans la relocalisation des industries.

« Notre rôle, en tant qu’experts en immobilier d’entreprise, est de mener des actions en lien étroit avec les promoteurs, développeurs pour nourrir ce projet de relocalisation industrielle. Il nous faut anticiper. Nous devons générer des solutions clés en mains et répondre à la demande croissante des entrepreneurs industriels dans les meilleurs délais.  Notre challenge est de taille car il consiste en l’étude de la déconstruction et la réhabilitation de sites obsolètes, en la décontamination des sites pollués, mais aussi le dépôt par anticipation des autorisations d’urbanisme et environnementales. » explique Jean-François Berthier, directeur de l’agence Axite CBRE d’Annecy.

En définitive, seules les activités très technologiques et à forte valeur ajoutée pourront revenir sur certains de nos territoires. La Haute Savoie est armée pour attirer des industriels désireux de relocaliser leur activité en France, mais tous ne pourront pas se le permettre.

Pour cela, il faudra booster l’enseignement et la formation pour fournir une main d’œuvre performante. Il sera également nécessaire de travailler autour du problème du logement qui, dans certains secteurs, se révèle très coûteux. Et pour finir, nous devrons être actifs dans la création de nouvelles opportunités foncières en requalifiant le plus vite possible certaines zones d’activité vieillissantes et dont les fonciers ne sont pas optimisés.

« L’intelligence » immobilière doit se mettre au rythme de ces évolutions et accueillir ce nouvel usage « productif ». Chez Axite CBRE, nous travaillons depuis quelques temps déjà sur ce sujet et nous vous invitons à prendre contact avec nos conseillers pour nous faire part de vos besoins et ambitions industrielles.

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